En janvier, vous présentiez Swirl, une collection d'objets réalisés à partir de poudre de marbre recyclé. Comment est-elle née ?
Plusieurs inspirations ont contribué à la création de cette collection. Parmi elles, le matériau : de la poudre de marbre mélangée à de la résine. En fait, la méthode comme le rendu sont assez proches du papier marbré, sauf que la matière est en 3D ! Cela nous a épatés et donné envie de produire plein d'objets : vases, tables basses, bougeoirs… Les formes, elles, sont assez basiques - cylindres, cubes, demi-sphères - pour contrebalancer l'esthétique complexe du matériau.
En 2017, vous sortez la collection The Veterans, réédition de vos pièces les plus iconiques. Au passage, vous changez les modes de fabrication, les couleurs, les matières. Seules les formes perdurent. À croire que c'est la silhouette qui fait l'objet !
Cela dépend : parfois c'est la forme, parfois c'est la matière… Certes, c'est souvent la structure, mais peu importe. La vraie question, c'est de savoir si l'objet a besoin d'évoluer pour répondre à de nouveaux usages. Et puis vous savez, normalement, on réactualise les créations des gens morts ! Comme j'ai toujours plein d'idées et que je ne suis jamais satisfait, si j'ai l'occasion de faire évoluer l'une de mes créations, je ne me prive pas.
The Coal Office, l'une de vos dernières réalisations, est un lieu hybride, mêlant restaurant, showroom, espace de travail… C'est important pour vous de croiser les disciplines comme les champs d'application ?
Ce qui fait, je crois, la beauté de ce métier, c'est qu'il n'existe pas pour lui-même. Le design doit être appliqué. Normalement, une personne qui exerce un métier devient expert dans sa discipline. Or, personnellement, je m'ennuie très vite, et le design m'a permis de m'immerger dans des dizaines d'univers différents. D'ailleurs, je me sens bien pour créer quand je suis dans une position un peu naïve, que je ne sais pas trop où je m'aventure…
La source d'inspiration de la fameuse S Chair serait un poulet. On peut donc s'inspirer de tout et n'importe quoi ?
(Il rit). Effectivement, le point de départ, c'était un poulet. La conclusion à laquelle je suis arrivé est plutôt éloignée, mais précisément : si l'on a une idée trop nette de son objectif et que l'on ne s'expose pas à l'imprévu, alors les chances de produire quelque chose d'extraordinaire sont réduites. C'est l'une des raisons pour lesquelles j'aime l'univers de la cuisine. Les produits, les saisons, les clients aident les cuisiniers à être créatifs. Aujourd'hui, j'essaie donc de me confronter à toutes sortes de gens, propriétaire d'une boîte nuit, imprimeur, fleuriste… Car je serais évidemment un bien meilleur designer de vase si j'échange avec un fleuriste qu'avec quelqu'un de mon équipe !
⇒ Entretien paru dans Architectures À Vivre 113 : Rénovations disponible sur la boutique en ligne