Dès ses débuts, l'architecte breton Jean-Luc Héry a fait de son agence l'Atelier d'Ici une référence en matière de maisons individuelles dans la région. Présentant depuis plusieurs années ses réalisations au grand public lors des Journées d'Architectures À Vivre, il retrouve chaque année Yann et Julie, un couple de fidèles appréciant son travail. C'est donc tout naturellement à lui que ces derniers font appel, lorsque leur maison, située à une vingtaine kilomètres de Brest, devient trop étroite pour leur famille grandissante. Les études débutent, afin d’imaginer une extension. Malheureux hasard du calendrier, le père de Yann décède à ce moment-là. En héritage, il reçoit le vieux moulin en pierre situé sur la même parcelle que l’habitation et décide alors de mener à bien un rêve d'enfant : imaginer une nouvelle vie à ce vieil édifice, jusqu'ici conservé dans son jus, et s'y installer. L’architecte stoppe donc l’esquisse en cours, pour se mettre au travail sur ce nouveau projet. Mais avant d'accueillir la petite famille, de lourds travaux sont à prévoir, car l'intérieur manque cruellement de lumière et l'espace – jadis de travail – est pour le moins étriqué.
MISE EN VALEUR DU PATRIMOINE
Les échanges avec la commune sont positifs dès les premières démarches. La mairie est très favorable à la restauration de ce monument local, libre de contraintes réglementaires. Les Architectes des Bâtiments de France, bien que n'ayant pas à valider le dossier, promettent même de se déplacer une fois les travaux terminés afin de découvrir le résultat. Le moulin est en bon état, la charpente d'origine est conservée. Seules de minimes retouches de consolidation sont à prévoir. Mais l'implantation, au milieu de zones d'eau – fonction originelle oblige –, nécessite quelques précautions. D’ailleurs, la famille à peine installée, la buanderie révèle, au moment des fortes intempéries de la fin décembre 2013, des problèmes d’infiltrations résolus par l’élargissement, en urgence et à grands coups de pelle, du lit du ruisseau jadis nécessaire au fonctionnement de la meule. Afin de mieux prévenir les risques, d’autres aménagements sont réalisés. Le niveau inférieur étant en deçà de la retenue d’eau, les deux caniveaux le long de la petite route en surplomb sont améliorés pour optimiser l’évacuation de gros volumes lors de futures montées. Une nouvelle dalle béton est coulée au niveau bas – à l'origine lieu de travail du meunier et jusque-là en terre battue – pour unifier et niveler l'ensemble. Dans une volonté de conservation du patrimoine, une vitre y est intégrée, depuis laquelle les occupants peuvent voir l'eau couler sous leurs pieds.
FAITES ENTRER LA LUMIÈRE
Yann et Julie sont soucieux du fait d’amener assez de lumière dans cet intérieur rustique, ceint par d'épais murs de pierres. Jean-Luc Héry propose de percer le pignon sud-ouest d'une large baie de 3 mètres par 5. Les petites ouvertures d'origine de la façade sud-est sont agrandies sous la forme d’une fenêtre en bandeau au ras de la route et en saillie, ainsi que d’une nouvelle porte d’entrée charpentée. Les planchers des étages, inexploités à leur juste hauteur et sombres, sont tous changés et redimensionnés afin de proposer des volumes de vie convenables.
Au cours de la phase d’esquisse, l’idée de couvrir le muret au nord pour en faire une cabane à outils aboutit finalement au dessin d’une petite extension. Quitte à imaginer un abri de jardin, autant donner une véritable plus-value aux lieux !
Cette nouvelle boîte en bois permet ainsi de dégager le rez-de-chaussée de toute circulation verticale. En découvrant les cadrages sur le paysage, le couple décide finalement d’en faire un espace de vie commun, alors qu’elle était à l’origine destinée à accueillir l’atelier de Julie, qui confectionne des sculptures de papier mâché et bois flotté. La famille entière peut ainsi jouir du panorama à toute heure de la journée, et l’espace de travail est déplacé sur la mezzanine de l’étage, au même niveau que la suite parentale. Quelques marches plus haut, les enfants occupent les combles, désormais percés d’ouvertures zénithales.
FICHE TECHNIQUE
♦ architecte Jean-Luc Héry – L’Atelier d’ici
♦ localisation Ploudalmézeau (29)
♦ année de réalisation 2013
♦ bâti d’origine XVIIe siècle
♦ études 6 mois
♦ travaux 10 mois
♦ surface 140 m2 SHON
♦ coût des travaux 189 500 euros HT (hors mobilier et honoraires architecte)
♦ détail financier en euros TTC charpente bois, couverture, menuiseries 73 200 / maçonnerie 39 000 / béton poli 8 800 / carrelage, plomberie, électricité, placoplâtre, isolation 46 000 / poêle SUPRA 1 200 / cuisine complète 8 000 / terrasse bois 2 000
♦ matériaux utilisés Douglas (ossature et bardage de l’extension) / chêne et sapin (menuiseries intérieures) / aluminium (menuiseries extérieures) / béton poli et teinté (dalle) / peintures à l’eau sans solvants et sans COV
♦ dispositifs énergétiques isolation renforcée / vitrage à faible émissivité / poêle à bois Flamme verte / projet de production d’hydro-électricité
♦ fournitures canapé jaune Ritchie / chaises de salon Pierre Garriche / sculptures en papier mâché et bois flotté de Julie Droit