À l'origine, il y avait là une datcha. Elle avait été construite par une immigrée russe sur une butte boisée enserrée entre de vastes plateaux cultivés et des zones de forêt. Après quelques tentatives infructueuses pour consolider cette construction en bois non isolée et sans fondation, les propriétaires du terrain décident finalement de faire appel à un architecte pour imaginer ce qui doit être leur maison secondaire au cœur de l'Essonne. C'est au hasard d'une rencontre qu'ils découvrent le travail d'Iliana Genova et Simon Barthelemy, de l'agence NOVO, et décident de leur confier le projet. Leur rencontre avec le site va s'avérer toute aussi déterminante...
TRAVAIL DE MÉMOIRE
« Notre première impression, outre celle d'un lieu évidemment magnifique, a été celle d'un site chargé d'une histoire familiale,puisqu'acquis par les parents de la propriétaire au début des années 1960, révèle Simon Barthelemy. Dans ce contexte, notre approche se devait d'être à la fois respectueuse et attentive des usages et de la mémoire de ses occupants. L'objectif était de mettre en valeur les qualités remarquables du paysage au moyen d'une architecture qui ne s'efface pas pour autant. » Densément boisé, le terrain est en grande partie non constructible du fait de son patrimoine végétal classé, entre pins, chênes et bouleaux. Nul arbre ne pouvant être abattu, l'habitation doit être construite en partie haute de la clairière. Seule exigence des clients : disposer de vastes espaces partagés, au détriment de chambres réduites à leur strict minimum. « Privilégiant le rapport avec les éléments naturels, la forme de la maison s'invente dans une géométrie panoptique inversée, multipliant les cadrages vers l'extérieur » , résume ainsi l'architecte. Le gabarit induit par les lourdes contraintes du règlement d'urbanisme, conjugué à une implantation dans un site fortement en pente, déterminent un rez-de-jardin partiellement enterré . Pour l'éclairer en premier jour et faire profiter du panorama tous les espaces de vie, le projet s'étire alors sur la longueur, une impression atténuée par le plan masse en angle ouvert, qui offre aussi des vues latérales spectaculaires. Distinctement différencié, l'étage des chambres possède une toiture en pente inverse de celle du rez-de-jardin. Un contraste qui apporte dynamisme et légèreté à l'ensemble.
ÉTÉ VERT ET PAGE BLANCHE
C'est le site qui inspire également le choix des matériaux : le bois de mélèze est privilégié en rappel à la datcha, sa teinte anthracite assumée évitant un effet de mimétisme trop important pour mieux affirmer le projet comme une présence singulière. « Le béton gris clair souligne, lui, l'épaisseur des éléments, marqué par des moirages aléatoires qui se patineront au fil du temps, détaille l'architecte. Ces deux matériaux à forte naturalité, caractérisés par leurs monochromies affirmées, révèlent et magnifient la profusion naturelle des verts de l'été et des ocres de l'automne. » Le claire-voie du bardage s'avère néanmoins un défi « Notre souhait était que les lames soient disposées parallèlement à la pente du sol - afin d'être au plus près de son mouvement naturel -, ce qui supposait de travailler sur des orientations multiples, adaptées à chaque façade, poursuit Simon Barthelemy . Il fallait aussi garantir une continuité parfaite de motif d'une façade à l'autre, sur le principe d'un origami. Une mise au point longue et patiente a donc été nécessaire pour définir les sept largeurs distinctes propres à chaque façade, ainsi que l'angle des découpes des lames. » À l'intérieur : seules quelques modulations de couleurs. « L'espace doit être vécu comme unifié, unique, revendique l'architecte. Mais aussi comme une page blanche où inscrire la vie de tous. » La lumière donne corps à l'habitation : filtrée chaque matin par les arbres ou diffusée subtilement via la façade arrière en fin de journée, elle envahit l'ensemble des pièces et révèle la richesse des volumes. Sculptural, l'escalier situé au creux du pli principal de la maison est le point focal qui « entraîne tout un enroulement de plans dans son mouvement ascendant, comme un écho des complexes architectures végétales extérieures » . Une résonance immatérielle et intemporelle.
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FICHE TECHNIQUE
♦ architectes NOVO Architectures
www.novo-architectes.com
♦ localisation Itteville (91)
♦ livraison 2019
♦ études 10 mois
♦ travaux 20 mois
♦ surface 170 m²
♦ matériaux mélèze teinté anthracite (bardage bois) / zinc prépatiné anthracite (toiture) / ciment teinté gris clair (terrasse) / aluminium anodisé champagne (menuiseries extérieures) / chêne blanchi (parquet)
♦ équipements canapé Can et table T12 de Ronan & Erwan Bouroullec chez Hay / fauteuils d'Antonio Citterio chez B&B Italia / suspension Compendium de Daniel Rybakken chez Luceplan / appliques Glo-Ball Mini de Jasper Morrison chez Flos / sanitaires de chez Bette et de chez Alape / robinetterie de chez Hansgrohe