Tous les projets d'architecture ne naissent pas obligatoirement d'une volonté claire et affirmée des maîtres ouvrage. Il arrive parfois que le hasard s'en mêle, donnant naissance à des réalisations surprenantes, issues d'un enchainement de circonstances imprévues, comme cela a été le cas pour la rénovation et l'extension de cette chartreuse toulousaine.
Tout commence en 2016, alors que ses propriétaires - une famille de quatre personnes - habitent là depuis déjà quelques années. Un jour, la copropriété voisine leur propose de leur céder une parcelle en lanière de 2,50 x 20 mètres, mitoyenne de leur propre logement. Intéressé par l'offre mais dubitatif quand à la fonction qu'il pourrait lui trouver - peut-être une terrasse ? un patio ? une chambre supplémentaire ? -, le couple frappe à la porte de l'agence BAST, repérée dans les pages d'Architectures À Vivre. Alors les architectes visitent les lieux, commencent à élaborer un programme et imaginent plusieurs scénarii possibles. Finalement, ils arrivent à une solution qui convainc leurs nouveaux clients d'acheter le terrain.
Leur idée ? Ouvrir la maison existante sur le nouvel espace et réorganiser entièrement le rez-de-chaussée - qui accueillait autrefois seulement les pièces de vie -pour y intégrer une suite parentale en plus du séjour avec cuisine.
Si l'idée est séduisante, elle ne manque évidemment pas d'obstacles à sa réalisation, que BAST finira par tous surmonter. Le premier, et non des moindres, est d'ordre structurel. En perçant la façade sur toute sa longueur - environ 11 mètres ! - les concepteurs risquent à coup sur de faire s'effondrer la bâtisse.
« Comme il était techniquement complexe de trouver un système permettant d'ouvrir ou d'isoler complètement la cour, nous avons choisi de jouer avec cette caractéristique. Elle est donc composée de trois “temps” : l'un toujours extérieur, un autre sans cesse fermé, et entre les deux, un espace modulable. » Laurent Didier, architecte
« Pour éviter ce problème, nous avons consolidé l'ensemble avec trois poteaux en béton, chacun soutenus par deux micropieux de 11 mètres. Ensuite seulement, nous avons pu abattre le mur » , explique Laurent Didier, associé. Second frein au projet : la différence de niveau entre l'existant et la terrasse acquise, plus basse d'environ la hauteur d'une assise. Mais plutôt que d'équilibrer les deux espaces, les architectes choisissent d'exploiter cette caractéristique. Aussi décaissent-ils le sol de l'habitation sur une profondeur d'environ un mètre : une option qui leur permet d'installer ici une salle à manger, pour laquelle la dalle haute fait office de banquette, tout en atténuant la séparation autrement trop franche entre intérieur et extérieur. Dernière difficulté, enfin : imaginer une couverture pour le nouveau patio, puisque malgré la douceur du climat toulousain, la chartreuse ne peut décemment rester ouverte ! Jamais à cours d'inventivité, BAST conçoit alors sur mesure une verrière à moitié rétractable. Prolongée à son extrémité par une porte à ventaux vitrée, elle offre aux habitants la possibilité de s'isoler complètement de l'extérieur ou d'ouvrir le patio si le temps s'y prête. Comme quoi les imprévus ont parfois du bon !
Ce projet a reçu le Prix du Jury 2018 des Maisons d'Architectures À Vivre. Vous pouvez le visiter les 29 et 30 juin prochains lors des Journées d'Architectures À Vivre. Pour s'inscrire aux visites cliquez-ici !
Article paru dans le Hors-série 39 d'Architectures À Vivre : Maisons de plein air !