Rédigé par Raphaëlle Saint-Pierre | Publié le 17/06/2020
En 2017, Séverine, Thomas et leurs deux enfants commencent à se sentir à l'étroit dans leur maison de ville cherbourgeoise. À quelques rues de chez eux, ils découvrent que les ateliers du Parapluie de Cherbourg, fabrique créée par un admirateur du film de Jacques Demy, sont à vendre après leur déménagement dans des locaux plus adaptés. La parcelle de 400 mètres carrés est entièrement occupée par deux halles construites dans les années 1970, l'une alignée sur la rue et l'autre perpendiculaire. Avant de signer leur acquisition, le couple fait visiter les lieux à Florent Lequertier de Trapèze Architecture, qui travaille entre la Normandie et la région parisienne. « J'ai découvert un terrain de jeux fantastique, raconte l'architecte . Les clients voulaient une maison assez conviviale où parents et enfants sont ensemble mais sans se gêner. ls rêvaient d'une habitation où ils pourraient aussi bien faire du sport que la fête car ils aiment beaucoup recevoir. »
MÉNAGER DES VIDES
Tous les habillages sont déposés. Seules la dalle en béton et les charpentes métalliques, hautes de 5,5 mètres au faîtage, sont conservées. Pour rester dans l'esprit de la manufacture, l'architecte choisit les matériaux les plus simples. Il remplace la toiture par un bac acier double peau, élève des murs en parpaings, enduits ou peints, et utilise du polycarbonate. Seul luxe : la belle brique sélectionnée pour revêtir certains murs. Le règlement d'urbanisme laisse Florent Lequertier assez libre, tant qu'il reste dans le cadre de l'enveloppe existante.
« Ce projet demandait de prendre le contre pied de la construction d'une maison, puisqu'il fallait créer des vides dans un ensemble plein, pour apporter de la lumière, de la ventilation et des vues », explique Florent Lequertier.
Après démolition de deux trames de la charpente métallique, il obtient une habitation de 200 mètres carrés. « Vu la profondeur de la parcelle, j'ai imaginé des séquences architecturales qui rompent la monotonie du parcours entre la rue et le salon. » Dans la partie située au nord, il place une courette d'accès et un vaste garage qui sert essentiellement de salle de sport et que toute la famille appelle « le gymnase » . Viennent ensuite les chambres qui ouvrent sur un patio ménagé au centre de la composition. À l'articulation des deux halles, cet espace extérieur permet de gérer le changement d'orientation. Sur l'un de ses côtés, le volume très bas de plafond du bureau partagé se démarque du reste de la maison. Traité comme une boîte noire cadrant sur le patio, avec un sol en parquet et non en béton vernis, il symbolise un pont entre les pièces de nuit et le séjour. « Dans le patio, l'architecture blanche et neutre des murs simplement enduits forme un écrin pour l'érable du Japon qui donne le ton avec ses variations de couleurs au fil des saisons. »
ESPACE TAMPON
Le salon, la salle à manger et la cuisine occupent le volume ouvert sur toute la hauteur de la seconde halle. « Je voulais éviter le cliché du loft new-yorkais donc j'ai proposé à Séverine et Thomas une inspiration plus neutre, avec une brique très claire et la charpente métallique peinte en blanc. » Pour un espace plus tenu, Florent Lequertier détermine une cote de 2,25 mètres qui s'applique à la fois à la hauteur des étagères, à celle du plafond du bureau ou de la mezzanine. Élaborée à partir d'éléments de la charpente démontée, cette dernière permet aux enfants de regarder tranquillement des films, protégés du vide par une tôle déployée la plus ajourée possible.
« Je l'ai un peu conçue comme une cage... » , s'amuse l'architecte.
À l'extrémité de la parcelle, l'orientation est cette fois plein sud. Florent Lequertier a dégagé un jardin sur lequel ouvre le séjour via une immense baie à galandage, dont les quatre vantaux s'effacent dans les murs et une serre. Simplement composé par la structure existante et un remplissage en polycarbonate, cet espace tampon emmagasine la chaleur le jour pour chauffer la maison la nuit. « À Cherbourg, il y a souvent du soleil mais aussi un vent froid : la serre permet à toute la famille de profiter des rayons tout en restant à l'abri… »
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FICHE TECHNIQUE
♦ architecte Trapèze - Florent Lequertier
www.trapeze-architecture.com
♦ localisation Cherbourg-en-Cotentin (50)
♦ livraison 2018
♦ bâti d'origine 1970
♦ études 6 mois
♦ travaux 10 mois
♦ surface 290 m² SHOB
♦ coût des travaux 280 000 euros HT (hors cuisine)
♦ matériaux métal (charpente existante) / parpaings (structure) / briques blanches, enduit minéral (façades extérieures) / panneaux de polycarbonate (serre) / bac acier double peau (couverture) / pannes métalliques issues de la charpente (mezzanine) / chape anhydrite vernie sur plancher chauffant (sols) / érable (parquet) / briques blanches Imperium Albius de chez Wienerberger (revêtement intérieur) / contreplaqué de bouleau (bureau sur mesure et plan de travail cuisine)
♦ équipements menuiseries extérieures Schüco, profils carrés, finition Fine structure / conduit de lumière Sun Tunnel de chez Velux / suspensions Bell de Normann Copenhagen