Rédigé par Raphaëlle Saint-Pierre | Publié le 25/10/2019
Après avoir vécu en Europe, Lindy, Paul et leur fille Mia retrouvent l'Australie il y a cinq ans. Ils achètent alors à Canberra une maison en brique des années 1920. L'étroite bâtisse de 153 mètres carrés, qualifiée de « bungalow » par les Australiens, mérite une bonne rénovation ainsi que la restructuration de son plan confus. Le couple souhaite également ajouter une extension pour abriter une cuisine-salle à manger et une suite parentale. Tombés amoureux du jardin, Lindy et Paul rêvent d'un lieu qui, dans l'esprit d'une véranda, leur permettrait d'en profiter au maximum. Ils s'adressent à l'agence d'Andrew Maynard et Mark Austin, basée à Melbourne et réputée pour ses réhabilitations de maisons. « Mais en réalité, c'est notre projet polémique de refuges pour activistes écologistes en Tasmanie qui les a poussés à nous contacter » , précisent les architectes.
« SUR LE PLAN ENVIRONNEMENTAL, DÉMOLIR ET RECONSTRUIRE NE SERA JAMAIS AUSSI DURABLE QUE DE CONSERVER ET RÉUTILISER ! » Andrew Maynard et Mark Austin, architecte
INTERVENTION AU SCALPEL
La maison se situe sur une artère percée conformément au plan d'urbanisme dessiné par l'Américain Walter Burley Griffin dans les années 1910 et 1920. Le quartier est soumis à une protection patrimoniale imposant des contraintes de hauteur, de revêtement de façade et de recul par rapport à la rue et aux mitoyens. « En tant qu'architectes, nous avons ressenti une immense responsabilité à préserver l'identité des lieux, plutôt que de suivre la mode actuelle à Canberra consistant à démolir les constructions de cette période pour les remplacer par d'imposantes villas ou à leur accoler des extensions agressives et écrasantes. Nous avons mené une intervention au scalpel » , explique Mark Austin. Les architectes répartissent 80 mètres carrés dans deux pavillons implantés l'un au sud et l'autre à l'est. Dotés de toitures à double pente, ils respectent la continuité des lignes et des couleurs du bungalow.
LIAISONS TRANSPARENTES
Les extensions sont élevées à l'aide d'une structure mêlant acier et bois. La cuisine-salle à manger repose sur une dalle en béton, tandis que la chambre des parents, visible depuis la rue, se dresse sur un socle de briques rouges recyclées qui s'étend au même niveau que celui de la maison 1920. En revanche, pour distinguer nettement leur intervention, le duo dessine un bardage de tuiles d'acier immaculées. « Chaque losange a été découpé et ajusté à la main par les artisans, comme des écailles de serpent qui recouvrent d'un seul tenant le toit et les façades. Les adjonctions contemporaines dialoguent ainsi avec les anciens murs de briques peintes en blanc. » Le résultat impeccable a demandé un travail au millimètre près, en particulier pour gérer les angles, les plis du faîtage, le revêtement continu sur les portes et la découpe des fenêtres et des baies.
Des tunnels transparents connectent les pavillons à la maison, « comme de petits ponts en lévitation au-dessus du jardin » , décrivent les architectes. Un nouveau couloir, lui aussi vitré, court sous le débord de la toiture du bungalow. En déportant ainsi la circulation, les architectes gagnent assez d'espace dans la demeure 1920 pour créer des pièces plus vastes et lumineuses : un salon avec un coin bureau et trois chambres.
« CHAQUE LOSANGE A ÉTÉ DÉCOUPÉ ET AJUSTÉ À LA MAIN PAR LES ARTISANS, COMME DES ÉCAILLES DE SERPENT QUI RECOUVRENT D’UN SEUL TENANT LE TOIT ET LES FAÇADES. » Andrew Maynard et Mark Austin, architectes
CONFORT THERMIQUE
« L'inscription de la cuisine-salle à manger dans le jardin procure à la famille davantage d'ensoleillement et de fluiditéentre l'intérieur et l'extérieur », poursuit Mark Austin. Le climat de Canberra présentant une grande amplitude thermique, l'agence a prêté particulièrement attention au confort d'hiver comme d'été. En plus d'une isolation performante, elle a misé sur l'inertie du sol en béton qui engrange la chaleur du soleil pour la restituer la nuit. La large fenêtre de toit qui se déploie en travers de la cuisine est munie d'un store extérieur à lamelles orientables. En activant manuellement les protections solaires et en favorisant la ventilation naturelle, les habitants parviennent à réduire drastiquement l'utilisation de la VMC. « Sur le plan environnemental, démolir et reconstruire ne sera jamais aussi durable que de conserver et réutiliser ! », insistent Andrew Maynard et Mark Austin.
« NOUS AVONS RESSENTI UNE IMMENSE RESPONSABILITÉ À PRÉSERVER L’IDENTITÉ DES LIEUX, PLUTÔT QUE DE SUIVRE LA MODE ACTUELLE CONSISTANT À DÉMOLIR LES CONSTRUCTIONS DE CETTE PÉRIODE POUR LES REMPLACER PAR D’IMPOSANTES VILLAS OU À LEUR ACCOLER DES EXTENSIONS AGRESSIVES ET ÉCRASANTES. » Andrew Maynard et Mark Austin, architectes
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FICHE TECHNIQUE
♦ architectes Austin Maynard architects
www.maynardarchitects.com
♦ paysagistes Bush Projects
www.bushprojects.com.au
♦ localisation Canberra, Australie
♦ livraison janvier 2019
♦ bâti d'origine années 1920
♦ surfaces 153 m² (existant) + 80 m² (extensions)
♦ matériaux acier et bois (structure) / béton (fondations extension cuisine-salle à manger) / brique rouge (fondations extension chambre parentale) / tuile en acier découpé à la main (bardage) / eucalyptus australien (rangements sur mesure)
♦ équipements capteurs solaires thermiques / cuve de récupération des eaux de pluie