ÉTAT DES LIEUX
Les architectes Yann Martin et Benjamin Clarens, fondateurs de CUT architectures, ont beau crouler sous les commandes, et pas des moindres puisqu’ils viennent de livrer l’hôtel Pullman Paris Montparnasse, ils ne refusent jamais les petits projets, voire les petits budgets, comme la transformation de cette ancienne loge de concierge, située au rez-de-chaussée d’un immeuble du 7e arrondissement parisien. « C’est l’ambition du maître d’ouvrage qui compte, explique Yann Martin, s’il veut quelque chose de différent, on est toujours partants. » Le propriétaire, un entrepreneur avec qui les architectes avaient déjà travaillé et qui avait totale confiance en l’agence, leur laisse carte blanche pour ce logement qu’il souhaite louer à des voyageurs réguliers partageant leur temps entre deux villes. Vingt-cinq mètres carrés traversant, une profondeur de seulement trois mètres, une belle hauteur sous plafond, deux pièces séparées par des cloisons légères, un état très vétuste et des matériaux de mauvaise facture : il n’y a rien à garder.
LA SOLUTION DES ARCHITECTES PAS À PAS
1. Les architectes font démolir les cloisons pour obtenir un open space en longueur, qu’ils décident de décliner à la manière d’une chambre d’hôtel, c’est-à-dire en évitant la réversibilité des meubles et la flexibilité des espaces, estimées contraignantes sur de petites surfaces. Se succèdent donc une chambre à coucher, une salle de bains ouverte sur l’entrée, une cuisine avec table pour les repas et un coin salon, dans une optique de confort.
Iridescent Studio - CUT architectures © David Foessel
2. Une épaisseur de rangements exploitant la hauteur de plafond est construite sur toute la longueur du studio. Elle permet d’harmoniser les renfoncements du mur et d’optimiser la partie supérieure des espaces occupés par les équipements de cuisine. Ces aménagements sont surmontés d’une main courante tubulaire en acier irisé qui permet de fixer l’échelle assortie.
Iridescent Studio - CUT architectures © David Foessel
3. La salle de bains trônant au centre de l’espace, colonne sanitaire oblige, Yann Martin et Benjamin Clarens prennent le parti osé de ne pas la cloisonner et même de l’hybrider avec l’entrée. Ils créent pour cela une grande vasque sculpturale également faite d’un zingage irisé, qui servira tout autant de desserte d’entrée. À l’arrière, la salle de bains est traitée de façon sobre et élégante, en carreaux de faïence blanche.
Iridescent Studio - CUT architectures © David Foessel
4. Malgré la petitesse de l’espace, le duo met un point d’honneur à créer une vraie chambre à coucher ne cumulant pas les usages, côté cour. Les solutions de rangement aménagées au-dessus de la tête de lit sont dessinées dans la même logique que celle de la cuisine.
Iridescent Studio - CUT architectures © David Foessel
5. Seules les zones intimes sont dissimulables derrière des rideaux en tissu. Lorsque celle de la salle de bains n’est pas utilisée, « c’est-à-dire 94 % du temps », comme le rappellent les architectes, elle est découverte de son voilage. L’espace ainsi ouvert se pratique comme une circulation.
Iridescent Studio - CUT architectures © David Foessel
AVIS D’EXPERT : AMÉNAGER SON STUDIO
CUT ARCHITECTURES ― L’AVIS DES ARCHITECTES YANN MARTIN & BENJAMIN CLARENS
Quand la tendance est à combiner les fonctions pour maximiser l’espace à disposition, vous prenez le parti de refuser la flexibilité : expliquez-nous.
Nous pensons que la flexibilité entraîne, au quotidien, une certaine dose d’inconfort. Quand on vit dans 25 mètres carrés, on fait souvent le choix d’un canapé-lit qu’il faut sans cesse déplier et replier, la douche est minuscule et la tablette rabattable pour les repas est finalement toujours déployée... Ce n’est pas pratique. Pour ce projet, nous avons essayé d’éviter ces écueils et de penser l’espace comme une suite d’hôtel conçue avant tout pour le confort de ses occupants, avec un grand lit, une grande douche, et un espace de vie.
Dans un projet de petite surface comme celui-ci, les principales fonctions domestiques se confrontent souvent dans un même espace. Comment faire pour conserver un ensemble esthétiquement homogène ?
Il est important d’utiliser les mêmes matériaux et coloris dans l’ensemble de l’espace, les mêmes matières venant alors recouvrir des fonctions différentes, et de se montrer mesuré dans leur choix. Le métal irisé se retrouve par « touches » un peu partout dans ce projet (vasque, hotte, barre d’appui de l’échelle, échelle) et lui donne sa personnalité. De même, le contreplaqué de boulot, qui recouvre les sols de part et d’autre, est aussi utilisé pour une partie des rangements et au niveau de la tête de lit.
Afin d’optimiser l’impression d’espace, vous avez ouvert la salle de bains sur le reste du studio, en premier lieu sur l’entrée. Comment ne pas se rater quand on fait un pari si osé ?
Nous avons fait de la vasque un élément sculptural, avec une belle forme courbe et un traitement intéressant du matériau. En plus de son rôle hybride de meuble d’entrée et de bains (la seule pièce de mobilier à mutualiser deux fonctions !), cet élément fait office d’ancrage visuel. Il va attirer l’attention et donc détourner le regard de la salle de bains en fond. La présence très graphique de l’échelle en métal irisé posée contre la paroi de la douche contribue également à la valorisation et la mise en lumière de cet espace. Grâce à cet aménagement ouvert, la douche est très spacieuse, c’est un détail à ne pas oublier !
D’autres conseils pour réussir la rénovation de son studio ?
Oui : maximiser la lumière naturelle, c’est parfois la clé de la réussite d’un projet. Bien sûr, ne pas saturer l’espace de meubles et de fonctions. Et puis trouver quelques astuces, par exemple pour le téléviseur, qui fait généralement partie des éléments à intégrer au salon : nous l’avons dissimulé derrière le miroir sans teint servant de crédence à la cuisine. Ni vu ni connu !