Fondateurs de Récita Architecture en 2018 à Lyon, Christophe Desvignes et Luc Pigeon sont deux ans après lauréats des Ajap (Albums des jeunes architectes et paysagistes) pour une maison individuelle à Dallet, dans le Puy-de-Dôme, où se trouve leur autre agence. C’est non loin, à Clermont-Ferrand, qu’ils livrent en 2023 le réaménagement complet d’une maison presque centenaire du centre historique. Christophe Desvignes explique comment la pierre de Volvic, lave des volcans proches au gris sombre, forme l’essentiel des constructions en ce coeur de la cité, au point d’en avoir façonné l’identité, l’exemple le plus marquant étant la cathédrale gothique qu’acheva Viollet-le-Duc. « Malheureusement, comme dans la majorité des villes françaises, l’usage de la pierre massive et structurelle dans la construction a disparu au cours du XIXe siècle. Situé dans un site classé et donc sous l’oeil de l’architecte des Bâtiments de France, le projet de transformation de la maison s’intègre au contexte grâce à l’emploi de la pierre de Volvic. » Ce sont déjà des pierres de Volvic qui constituent les encadrements originels des baies de la façade côté jardin, où sur presque toute la largeur du rez-de-chaussée se déploie désormais « l’encadrement en pierre massive ». Ses éléments sont assez fins pour que s’intercalent entre eux d’amples vitrages toute hauteur : en résulte quasiment une façade rideau. « Ils ont reçu un travail de taille et de calepinage très soigné, tel un ouvrage précieux fait de retraits successifs, de feuillures et de joints creux, un assemblage à la manière de Carlo Scarpa ou d’Auguste Perret. »
La terrasse créée au premier plan, quant à elle, est en béton teinté dans la masse et intègre des granulats de lave concassée : ainsi s’approche-t-elle au plus près du coloris bien particulier de la pierre qu’elle vient affleurer. « La filiation esthétique entre ces deux matériaux, pourtant culturellement éloignés, illustre un métissage constructif tout à fait contemporain : créer un lien entre l’architecture du coeur historique et celle des faubourgs modernes du début du XXe siècle. La matière et sa couleur sont au centre de ce dispositif. Nous trouvons particulièrement stimulant de travailler avec des matières ayant naturellement une forte présence chromatique, plutôt que de recourir à des peintures. »
« Contact direct avec la matière et sa couleur »
À la blancheur du premier étage, ainsi qu’au gris sombre du rez-de-chaussée en pierre, du toit en ardoise et de la terrasse en béton, s’allie la note d’or du laiton qu’arbore le garde-corps équipant l’accès à la cave, incisé dans la terrasse. Transparent, le niveau en pierre laisse voir comment le dialogue chromatique se poursuit à l’intérieur. C’est Luc Pigeon qui prend le relais pour exposer l’emploi de ce laiton appelé à adopter une patine mate et « placé à des endroits stratégiques, où l’on a un contact direct avec la matière et sa couleur ». De fait, il ponctue les deux pièces donnant sur la terrasse – cuisine et salle à manger –, en continuité l’une de l’autre. Ainsi y sont en laiton les montants et les plateaux des étagères, de même que les poignées rythmant les placards, en panneaux de bois rainuré avec finition laquée blanche. Tous ces éléments menuisés ainsi que les poignées ont été dessinés sur mesure par les architectes. L’unité de traitement entre les deux pièces se trouve encore renforcée par la blancheur de leurs murs et de leurs plafonds, comme par le parquet en chêne. « Sur la partie salle à manger, le parquet est d’origine. Côté cuisine, nous avons recréé un nouveau parquet identique, et avec une finition très proche. »