Rédigé par Jean-Philippe Hugron | Publié le 03/02/2020
« Nous sommes une agence d'architecture implantée à Toronto et nous mêlons conception architecturale et préservation patrimoniale », revendique Joey Giaimo.
La phrase fait d'autant plus sens qu'elle peut être aisément illustrée par des projets récemment livrés. Parmi eux, la South House. C'était, à l'origine, un simple bungalow. Là où de nombreux professionnels auraient renié toute une histoire en arasant un passé frugal, Joey Giaimo a pris le parti de révéler ce « petit patrimoine ». Pour ce faire, une première étape : l'enquête. Initiée au début du processus de conception, elle aborde la prise en compte d'un contexte, d'une banlieue, plus exactement du quartier Lakeview à Mississauga, au sud de Toronto. Ce lotissement est né il y a plus d'un siècle. L'ambition était alors de loger chichement des militaires enfin de carrière ou à la retraite. Plusieurs promoteurs ont tenté l'aventure. L'un d'entre eux avait même réalisé en 1926 un pavillon-témoin : la South House !
Elle est donc, à elle seule, un modèle sinon un archétype de ce quartier qui, avec les décennies, n'a eu de cesse de changer. Tout un chacun, à partir de sa modeste maison, a en effet créé des extensions diverses et variées. « Croissance lente » et « construction progressive » caractérisent, selon l'architecte, ces quelques rues toron taises.
Fort de cette étude, Joey Giaimo n'imagine pas, dès lors, un seul instant, démolir la construction d'origine mais, à l'image de tous ces témoignages du passé, de créer un ajout, une extension, laquelle devait, entant que telle, s'affirmer. Le mot d'ordre : « compléter et contraster », dit-il. Le nouveau volume permet d'ajouter 40 mètres carrés. En outre, il doit opérer comme un mur antibruit. Volontairement fermé, il fait face à une artère passante, la « troisième rue ». Pour magnifier la présence de cet objet singulier, il est habillé de longues bandes d'acier qui font écho aux planches de bois des murs extérieurs de la propriété existante. Le bleu, quant à lui, est un moyen d'exister dans un paysage composite. À l'intérieur, par jeu de contraste, au métal froid succède la chaleur du bois de la délicieuse charpente en placage d'érable du toit en pente, invisible depuis l'extérieur, qui participe de la surprise. En outre, elle est une réinterprétation subtile du vocabulaire de ces pavillons typiques. À Joey Giaimo de se féliciter d'avoir ainsi pu « préserver les qualités de cette “ première banlieue ” ».
► Article paru dans le Hors-série 45 : 1001 désirs d'intérieurs