Rédigé par Jean-Philippe Hugron | Publié le 17/03/2021
La crise sanitaire a-t-elle changé la nature de vos commandes ?
Avec la crise, les gens ont envie d'être encore mieux chez eux et pour des périodes plus longues. Les lieux de vie doivent rassembler tout en permettant l'autonomie. C'est une véritable prise de conscience liée à l'expérience du confinement. Chacun souhaite tout pouvoir faire de chez lui. En conséquence, mes clients se montrent plus disponibles et impliqués dans le projet et c'est une bonne chose ; si auparavant, un appartement était pour beaucoup un lieu de représentation, il est devenu plus que jamais un lieu de vie au sens global.
Comment abordez-vous la conception d'un séjour ?
Il m'importe, de prime abord, de créer des perspectives. Les appartements urbains ont parfois des distributions compliquées. Je m'applique à penser des plans qui multiplient les points de vue et les points de fuite. J'ai la réputation de tout casser pour retrouver une fluidité visuelle et physique entre les espaces. Aujourd'hui, les salons sont plus que des salons. Ce sont des pièces de vie mêlant détente, travail, musique, cinéma, où l'on peut dérouler un tapis de yoga, prendre un repas informel, et où la cuisine n'est jamais loin. Il s'agit vraiment de « living room » au sens anglo-saxon, c'est le cœur de la maison, qui rassemble, et permet quantité d'activités.
Quelles sont vos pistes de recherches ?
Je propose à mes clients des expériences sur mesure. L'espace de travail, puisqu'on parle beaucoup de lui actuellement, peut exister de différentes manières dans un salon. Récemment, j'ai imaginé pour un couple une tablette à géométrie variable qui court tout le long d'un mur de 4 mètres ; elle s'élargit un peu pour lui qui a besoin de poser son ordinateur portable, et s'élargit bien davantage pour elle à l'autre bout, où elle manipule les céramiques qu'elle crée. J'ai aussi imaginé dans des volumes plus conséquents un dispositif qui permet de s'isoler complètement dans ce qui serait, en abaissant quelques toiles, un cinéma privé. Dans le domaine de l'édition, j'ai dessiné Koya pour Ligne Roset, un bureau cabane qui permet là aussi de se retirer grâce à des écrans textiles amovibles.
Sur quels objets ou pièces de mobilier en lien avec le salon travaillez-vous actuellement ?
La salle à manger - en lien avec le salon quand elle n'est pas déjà dans le salon - est aussi un espace en pleine mutation. Avec la covid-19, nous recevons moins et la table se révéle être multifonctions. J'imagine alors que celle-ci puisse disparaître au profit d'une « méga table basse », à une hauteur intermédiaire, qui permettrait de dîner de façon informelle en restant assis sur son canapé et sur ses fauteuils.
Les études montrent également que les Français aiment toujours lire ; il faut alors trouver dans le salon des coins calmes et confortables. Un bon éclairage, chaleureux et efficace, est fondamental. Je travaille en ce moment sur la question de la diffusion de la lumière, ou comment réinventer l'abat-jour. Trop archétypal, il a été jugé ringard, puis oublié. Il donne pourtant une teinte, une intimité. J'ai envie de retrouver ses qualités. Toujours plus de confort est le maître mot ! Les textiles ont aussi leur rôle à jouer, et c'est un domaine que je souhaite développer. Je cherche ainsi à travailler parfois de manière innocente des sujets simples pour m'autoriser le plaisir de la découverte.
► POUR EN SAVOIR PLUS : www.dorner-design.com