Rédigé par Jean-Philippe Hugron | Publié le 27/03/2020
À Bilbao, une construction anonyme de l'entre-deux-guerres. Elle forcerait aujourd'hui l'admiration : elle mêle logements, bureaux et commerces. Si la mixité était autrefois une évidence, elle est aujourd'hui un exploit tant les réglementations sont complexes. Que dire ensuite de la réversibilité ? Elle est désormais un argument de choix pour les architectes qui, livrant un hôtel par exemple, assurent qu'il peut être aisément reconfiguré… en école ! Dans cette construction la question ne se pose pas. Tout y est transformable et ajustable. Aussi, les bureaux du premier étage peuvent devenir… un appartement.
À l'origine, cinq petites pièces, deux toilettes et un couloir en L.
Álvaro Cordero et Carlos Garmendia envisageaient de prime abord un « changement radical » où « il était exclu de préserver quoi que ce soit ». En d'autres termes, la logique réclamait « de vider complètement les lieux comme étape préalable à toute nouvelle distribution ». Soit. Réflexion faite, il pourrait en être autrement.
« Avant d'envisager un nouvel appartement, nous avons décidé d'analyser les avantages et les inconvénients de ces bureaux. D'une part, nous notions la présence, dans les locaux, d'une grande surface vitrée, beaucoup plus grande que d'habitude. De plus, ces fenêtres s'étendenttout du long de la façade » expliquent-ils. Lors de cette patiente recherche, le duo note également une hauteur sous plafond généreuse, de plus de trois mètres, ainsi qu'une structure de piliers et de poutres en béton. Il y avait bien, au-delà des cloisons tertiaires, des qualités à exploiter.
« Nous avons décidé, dans la mesure du possible, de valoriser ces particularités perçues comme positives et de souligner l'horizontalité des baies vitrées, si singulières, créant ce rapport particulier avec l'extérieur », pour-suivent-ils. In fine, ils découvrent un « caractère industriel » qui n'est pas sans leur déplaire. Ils souhaitent alors le théâtraliser davantage, notamment par une entrée dont la couleur noire, par contraste, met en scène le salon et, plus loin, le spectacle de la ville.
« En ce qui concerne la matérialité, nous avons imaginé une confrontation consciente entre dureté et chaleur où le béton brut est adouci par l'utilisation de matériaux agréables tels que le chêne ou encore des tons neutres ou bien des rideaux classiques permettant notamment d'obtenir une atmosphère agréable », précisent les architectes. Ce projet est donc, pour ces concepteurs, une petite leçon car, finalement, « il existe beaucoup d'histoires qui méritent de rester visibles ».
⇒ Projet paru dans le Hors-série d'Architectures À Vivre 45 : 1001 désirs d'intérieurs