Rédigé par Raphaëlle Saint-Pierre | Publié le 06/11/2013
Dans le quartier dublinois de Grangegorman, parmi les pavillons traditionnels, la maison minimaliste de l’agence Odos peut surprendre. Se déjouant des typologies habituelles, ses fondateurs proposent une alternative aux réalisations de densification urbaine résidentielle qui se développent sans aucune originalité dans le centre de la capitale irlandaise. Insérer ce morceau d’architecture contemporaine décomplexée dans un contexte régi par de strictes règles d’urbanisme n’est pas une mince affaire. Mais les quarantenaires Darrell O'Donoghue et David O'Shea, qui ont fondé leur agence en 2002 dans cette même ville, ont l’habitude. Ils sont les auteurs d’une quinzaine de maisons en Irlande, depuis la simple extension jusqu’à des ensembles d’habitations, et savent manier avec délicatesse l’échelle urbaine et domestique sans pour autant faire la moindre concession à la tradition : toits plats, béton apparent, larges baies vitrées, etc.
Scintillante
Tout en éclat et en légèreté, la maison apparaît telle un point d’exclamation placé à la fin d’une rue typique : façades revêtues d’épaisses peintures colorées, toitures à doubles pentes, fenêtres ornées de festons – tout ce qui fait le charme de l’Irlande mais qui se doit d’être questionné par les jeunes créateurs. Malgré une esthétique totalement opposée, l’habitation est conçue de manière à s’intégrer parfaitement dans le site en termes de proportions et de composition. Habillée de verre et de métal, elle ne se dévoile qu’à moitié, cultivant le mystère. Des baies vitrées toute hauteur, fixes et sans cadres, saisissent un maximum de lumière tandis qu’un bardage de plaques d’aluminium anodisé satiné, larges ou étroites, fixes ou mobiles, dissimulent les zones les plus privées aux regards des passants. Les trois niveaux, de plus en plus hauts sous plafond, se lisent en élévation grâce aux lignes horizontales de la structure. Au rez-de-chaussée, un garage atelier entièrement opaque – son commanditaire est un passionné de moto –, et au-dessus deux étages d’une cinquantaine de mètres carrés chacun. Tout en haut, une terrasse à moitié dissimulée donne un peu de profondeur à la façade sur rue. Un écran de protection extérieur est formé de lamelles d’aluminium disposées à la verticale pour s’accorder avec le bardage. Installés de façon irrégulière, ces brise-vue offrent un aspect semi transparent, surtout depuis l’ouest et le soir quand tout est allumé à l’intérieur. À l’arrière, la petite cour, en partie protégée par le porte-à-faux des étages supérieurs, semble pénétrer dans la maison.
Axe lumineux
La porte d’entrée ouvre d’emblée sur les trois niveaux et les deux volées de l’escalier. Le long puits de lumière qui le surmonte accentue le sentiment d’ampleur et éclaire naturellement cet axe de circulation qui relie l’ensemble tout en regroupant les espaces de services, la salle de bains, la cuisine et les rangements comme la bibliothèque. L’habitation, qui marie avec simplicité murs blancs et sols en bois, se développe sans interruption du premier, qui accueille la chambre du propriétaire et celle réservée aux amis, au second où s’étend le séjour. À l’arrière, la vue s’ouvre largement sur le parc d’un asile psychiatrique, longtemps laissé à l’abandon et actuellement en cours de réhabilitation pour accueillir de nouveaux locaux et un campus. Cette réalisation a reçu le prix de la meilleure maison irlandaise 2009, décerné par l’Irish Architecture Award.
http://www.odosarchitects.com/