Les Jeux olympiques et paralympiques sont un événement hors norme… À travers le sport, ils sont à chaque fois l'occasion d'incarner l'image, les richesses culturelles et les savoir-faire productifs et créatifs de chaque pays hôte - la maison Chaumet, fleuron de la joaillerie française, signe les médailles, tandis que Mathieu Lehanneur dessine la torche. Mais aussi ses valeurs humaines, sociales, d'ouverture, de fraternité, de paix, à travers la vision qu'il propose de l'olympisme. Un projet de design global à part entière, donc, piloté à Paris par le directeur artistique Joachim Roncin, membre du Comité olympique, avec l'équipe duquel Philippe Daguillon, directeur de création chez Decathlon et chargé du partenariat avec Paris 2024, et ses collaborateurs ont étroitement travaillé. Ce dernier explique : « Les Jeux, ce ne sont que des symboles avec lesquels il faut jouer. On a l'accueil du monde en ligne de mire. Depuis l'édition de Mexico, en 1968, le vrai tournant design des Jeux, chaque pays d'accueil crée une identité visuelle propre qui parle de son époque, réinvente l'olympisme à travers un prisme culturel particulier. C'est dans ce contexte très spécial - et très stimulant ! - que nous avons travaillé, en tant que marque conceptrice et distributrice de produits sportifs, à la création des tenues des relayeurs de la flamme, de celles des volontaires, d'une collection capsule de vêtements de sportswear distribuée dans nos magasins, et que nous avons eu la chance de mener une démarche de cocréation et d'accompagnement de 33 athlètes olympiques et paralympiques. »
Laboratoire exceptionnel
La richesse d'un tel partenariat, c'est aussi une sorte d'accélérateur de R&D. Un terrain d'exploration hors échelle pour mettre en pratique, questionner et faire évoluer les méthodes de design de l'un des plus gros studios intégrés français - près de 500 designers représentant la quasi-intégralité des métiers, du produit au stylisme, en passant par le graphisme, l'ingénierie ou encore les matériaux. Et de faire tenir ensemble des enjeux multiples : techniques et fonctionnels, évidemment, et de performance. Mais aussi d'image, pour la marque et les Jeux. Le tout en interrogeant par le design la capacité des pratiques sportives à créer de l'inclusivité et du lien social, à l'échelle du territoire tout entier. Le sport pour tous, donc. Et puis de tester la relocalisation de certains pans de la production en France, notamment textile. Un autre enjeu fort, à moyen et long terme. À cet égard, la conception de la panoplie des volontaires (16 pièces, de la tête aux pieds) est tout à fait intéressante. « Ces gens sont le vrai visage des Jeux, précise Philippe Daguillon. Leurs missions seront multiples : accueil du public, encadrement des athlètes, accompagnement des délégations, etc. Ils seront sur tous les terrains et par tous les temps. Il fallait donc concevoir une tenue qui s'adapte à une multitude de besoins, qui soit facilement indentifiable, unisexe, capable de s'adapter à toutes les morphologies, et qui raconte aussi la France, d'où, par exemple, pour les maillots le choix de réinterpréter la marinière. » Sacré brief !
Du côté de la cocréation avec les athlètes, les approches ont également été multiples, de l'équipement pour la compétition - la tenue et la planche de skate, nouvelle discipline olympique, du rider Edouard Damestoy - au développement de produits performants pour le grand public - un chausson d'escalade avec les frères Mawem ou un kayak gonflable avec la para-athlète Nélia Barbosa, par ailleurs étudiante en design -, en passant par la création de tenues sportswear porteuses de valeurs d'inclusivité, comme avec la para-cycliste Marie Patouillet. « Tout dépend de la personnalité de l'athlète et de ses envies, de ce qu'il veut apporter au sport, poursuit le designer. C'est un échange, un dialogue, qui amène d'ailleurs à des poches stratégiques pour l'entreprise sur lesquelles on peut investir à plus long terme. Et puis être au contact de ces personnalités si diverses, de leur exigence, c'est une leçon de vie. Ça pousse à se surpasser. Finalement, le design est presque aussi un sport : plus on le pratique, meilleur on devient ! » Rendez-vous en juillet !