Dressée en haut de son tertre rocailleux, petite mais massive, elle fait la loi dans le petit village d'Eygalières, au pied du merveilleux massif des Alpilles. La chapelle romane Saint-Sixte est une icône provençale bâtie au XIIe siècle. Inscrite au titre de monument historique depuis 1971, rien ne peut se construire dans son périmètre sans avoir été adoubé par l'architecte des bâtiments de France.
Cette contrainte n'a pas facilité la tâche, déjà ardue, de l'architecte Bruno Tonfoni auquel il aura ainsi fallu 5 années pour achever la construction d'un mas de 250 mètres carrés sur deux étages. Tartarin de Tarascon, le pont d'Avignon, les santons et bien d'autres encore sont des symboles de cette célèbre région du sud-est de la France aux caractéristiques affirmées et protégées. L'architecture, elle aussi, témoigne d'une tradition constructive locale, mais au-delà de la définition d'un style vernaculaire, c'est dans les conditions géographiques et climatiques qu'elle trouve son origine. Et notamment le mistral, ce vent catabatique dominant qui sculpte les reliefs et la flore.
C'est à tout cela que Bruno Tonfoni a été sensible lorsqu'il a conçu ce projet, dans le prolongement de ce qui existe, avec l'objectif évident d'inscrire cette construction dans son temps. Orientée nord-sud, allongée d'est en ouest, la bâtisse est adossée au bosquet de chênes verts qui ferment le terrain au nord pour se protéger des bourrasques.
« Nous en avons simplifié l'expression en la dépouillant de tous signes extérieurs provençaux pour aboutir à une architecture à la fois familière et contemporaine par sa simplicité et sa clarté géométrique » Bruno Tonfoni et Dominique Cico
Presque aveugle sur cette façade, elle est généreusement ouverte au sud, au rez-de-chaussée, grâce à des baies coulissantes à galandage qui disparaissent dans l'épaisseur des murs. Ceux-ci sont réalisés en blocs de pierres de Fontvieille, une carrière voisine de calcaire blanc aux reflets blonds ; technique ancestrale faisant appel à des savoir-faire locaux, la maçonnerie porteuse est ici dépouillée de tout ornement, assemblée avec simplicité, épaisse pour se protéger des hautes températures. Dans la continuité de cette matière, la toiture en pente douce, réalisée en lauzes de calcaire appareillées, complète le dessin d'un volume simple mais radical, provençal certes mais loin de tout stéréotype. Les intérieurs, organisés autour d'un grand vide central, sont à l'unisson, lumineux et confortables, protégés des rayonnements solaires et du mistral par les murs épais. Ils font la part belle aux matières brutes et naturelles à l'image des menuiseries intérieures, de l'escalier, du mobilier sur mesure en chêne massif et de la passerelle en béton coffré.
Article paru dans le hors-série 37 : 1001 désirs d'intérieur (déc-janv-fév 2017/2018)
⇒ Isolation intérieure : Le respect de la réglementation thermique obligeait un doublage intérieur ; pour rappeler la pierre massive porteuse ainsi masquée, le mur d'échiffre, qui glisse derrière la passerelle en béton, est réalisé dans ce même matériau.
⇒ Garde-corps : Bois massif, béton brut, pierre naturelle ; pour ne pas alourdir la palette de matériaux, les garde-corps ont été réalisés en verre structurel, la transparence s'imposant comme une évidence.