Ce ne sont pas moins de quatre générations qui ont forgé la destinée de Lago. L'histoire commence à Venise, à la fin du XIXe siècle : l'ébéniste Policarpo Lago distille alors son savoir-faire dans les églises locales. Ses descendants se spécialisent ensuite dans le mobilier pour les chambres et halls d'entrée. Dans les années 1980, les suivants s'intéressent aux autres pièces domestiques, avant qu'en 2006 la dernière génération ne réfléchisse à d'autres axes de développement pour mieux s'ouvrir au marché mondial. Aujourd'hui, l'entreprise compte ainsi plus de 400 magasins à travers le globe et propose du mobilier pour toute la maison...
Cette approche globale s'appuie sur une vision du design comme outil de transformation sociale, où la recherche du sens est tout aussi importante que celle de l'usage. Pilotée par Daniele Lago, la création est aussi alimentée par des workshops où sont conviés de jeunes créateurs. « Notre écosystème est unique car généré par des individualités qui se meuvent en symbiose et qui tentent, à travers le design perçu de manière holistique, de faire de la marque quelque chose de spécial », affirme le designer. L'espace domestique est perçu comme un système participatif au sein duquel les meubles ne sont plus figés et communiquent entre eux mais aussi avec leurs utilisateurs qui peuvent les personnaliser sans fin. Plus que des objets, Lago imagine des alphabets.
Ainsi est né en 2003 le concept emblématique de rangement 36e8®, une unité carrée de 36,8 centimètres de côté. Ce système modulaire est développé ensuite dans la plupart des collections, avec des solutions pouvant être intégrées les unes aux autres et s'adapter aux différentes zones et styles de la maison selon les desiderata de l'habitant. Le projet Talking Furniture (2015) va encore plus loin dans cette interaction objet/utilisateur : chaque meuble est équipé d'une puce scannable pour recevoir des informations sur le produit, ou stocker des images, du son et des vidéos, afin de créer un récit émotionnel enregistré dans la mémoire de l'objet. « Toutes ces solutions innovantes sont nées d'une analyse des besoins de la société et des échanges continus entre notre bureau d'études et celui dédié à la recherche et au développement, analyse Daniele Lago . Nous revendiquons un design léger et surprenant, systémique et coordonné. »
Historiquement, Lago a une attache particulière avec l'univers de la chambre et y propose des solutions en droite ligne de ce manifeste. Parmi elles, le dressing N. O. W. et le surprenant lit Fluttua (2004) où « la sensation de suspension est rendue possible grâce à une structure en acier ancrée au mur, résume Daniele Lago . C'est notre expérience en matière de fixation murale et les études d'ingénierie internes qui ont abouti à ce produit fascinant. Nous mettons aussi en œuvre de plus en plus de solutions de tête de lit, enrichissons nos systèmes de rangement avec de l'éclairage et étudions d'autres évolutions plus technologiques orientées vers le bien-être nocturne » . Car pour Lago, la véritable révolution ne concerne pas tant le produit, mais plutôt ce qui se passe autour de lui. Après le premier Appartamento Lago en 2009 à Milan (un logement privé entièrement meublé par la marque), l'entreprise lance en 2015 le Lago Design Network : des magasins, bureaux, musées, cafés, restaurants ou encore hôtels, dont le concept est ainsi résumé par Daniele Lago : « si le design est un instrument de transformation sociale, pourquoi ne pas l'utiliser pour apporter du bien-être même en dehors des espaces domestiques ? Ainsi sont nés ces lieux dans lesquels il améliore l'expérience et devient porteur de culture et de relations, voire d'activité professionnelle » . Toute la force d'un design pas comme les autres.
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