À l’image des jeunes gens du XVIIIe, qui, pour parfaire leur éducation, partaient pour le Grand Tour – une découverte de la Botte du Piémont à la Calabre –, César Garçon a traversé la péninsule de part en part. Ces deux années de travail et de visites donnent un ouvrage co-écrit avec le voyagiste Pierre de Filippis. À l’intérieur, un fil vert : les jardins. Le tandem a en effet passé plus de 4 000 lieux à la loupe, croisant et recroisant les critères pour n’en publier que les 38 plus émouvants. De quoi découvrir, mais aussi comprendre, de limonaie en collines jardinées, les grands courants de création qui ont modelé le jardin à l’italienne. Au fil des pages, le lecteur rencontre donc des incontournables, tels les beaux jeux d’eau de la villa d’Este, près de Rome, ou le magnifique parc de Boboli à Florence. Immortalisés dans le tendre soleil des matinées transalpines, se révèlent aussi des endroits plus secrets, au hasard de domaines méconnus ou tombés dans l’oubli. Ce qui caractérise toutes ces œuvres d’art ? « Ce sont des espaces où eau, pierre et fleurs s’entremêlent sans cesse, constate César Garçon. Ils oscillent entre la grandiloquence de l’Antique, avec un goût toujours prononcé pour la statuaire, et la spontanéité de floraisons d’inspiration anglaise. ». Et de la Renaissance au XXIe siècle, perdure une préoccupation centrale pour le paysage : « Les Italiens n’ont eu de cesse d’intellectualiser la relation à leurs panoramas, et leurs jardins en portent la marque », conclut le photographe. Dans ces aménagements se dessinent donc, en creux, les contours d’un pays, de ses montagnes, de ses campagnes, de son histoire riche et tourmentée. Mais qu’il s’agisse des heures sombres au domaine de La Foce, icône toscane financée à l’aide du programme agricole de Mussolini, à celles, ensoleillées, des années 1990, où se rassemblent, sous des arbres majestueux, les happy few de la propriété princière Torrecchia, la lumière, en tout cas celle capturée par César Garçon, reste belle, douce, orangée.